Michel Barnier lors d’un meeting de campagne à Orléans (Loiret), le 5 novembre 2021. ARP

Michel Barnier joue collectif et mise sur « sa stature d’homme d’État »

Partage

En meeting à Orléans, Michel Barnier a présenté les grandes lignes de son projet pour la France. Le candidat à l’investiture à droite à l’élection présidentielle veut croire que sa longue expérience dans les arcanes du pouvoir, en France et en Europe, constitue son atout maître. Il se pose en rassembleur d’une équipe de droite soudée où chacun aurait sa place et qu’il pourrait opportunément mener.

Par Alberto Rodriguez Pérez
Publié le 8 novembre 2021

L’ancien négociateur en chef du Brexit poursuit son chemin avant le congrès LR qui désignera son candidat le 4 décembre. Il s’est arrêté à la salle Eiffel ce vendredi 5 novembre secondé par un noyau d’élus loirétains dont le député Claude de Ganay, le maire d’Orléans et président de la fédération LR du Loiret Serge Grouard ou encore Constance de Pélichy conseillère régionale et maire de La Ferté Saint Aubin. La députée Marianne Dubois, les sénateurs Hugues Saury et Jean-Noël Cardoux lui avaient annoncé son soutien, eux aussi.

Michel Barnier veut croire que sa longue expérience du pouvoir constitue son atout maître. Quasiment cinquante ans d’une vie politique bien remplie : plus jeune conseiller général de France à 22 ans ; benjamin des députés ; plus jeune président du conseil départemental de Savoie ; quatre fois ministre ; deux fois commissaire européen ; et enfin négociateur en chef du Brexit. Sans oublier son premier fait d’armes, dont il ne cesse de se référer trente ans après, l’organisation des Jeux olympiques d’Albertville en 1992. « Il coche toutes les cases », résume Serge Grouard. Les gens recherchent une figure présidentielle, il l’incarne. »

« Servir la France, prendre sa part au débat d’idées et être utile… »

Le 24 décembre 2020, celui qui aimerait porter les couleurs du parti Les Républicains vient de boucler l’accord avec le Royaume-Uni pour l’après-Brexit. Ses qualités de négociateur, inclusif, proche de tous lui ont valu un concert de louanges des Vint-Sept, qui ont applaudi son art du consensus, sa patience et sa ténacité. Ce soir-là, il annonce son retour en France pour « prendre sa part au débat d’idées et être utile ». Il assure avoir reçu dans la foulée un afflux de messages encourageants de la part d’élus LR à la recherche d’un chef. 
Six mois plus tard, il se déclare candidat à l’élection présidentielle d’avril 2020 « pour porter le projet à droite d’une France réconciliée » et devient alors le quatrième prétendant de la course interne à la primaire de la droite, après Valérie Pécresse, Philippe Juvin et Éric Ciotti. Depuis Xavier Bertrand les a rejoints.

Ce vendredi, devant deux cents militants et sympathisants du Loiret, M. Barnier affiche sa méthode, concertation et sens du collectif. « Vous ne pouvez pas diriger la France sans mettre tout le monde dans le mouvement », lâche-t-il sereinement s’empressant de dénoncer « la verticale, l’arrogante et la solitude » d’Emmanuel Macron. En opposition à l’actuel président, il dit « ne pas avoir la science infuse » et réclame des « idées » aux élus et aux personnalités de sa famille politique. Il faut, selon lui, « une équipe soudée où chacun aurait sa place et qu’il pourrait opportunément mener ».

Barnier, un gaulliste patriote, européen et progressiste 

Silhouette élancée, costume impeccable, cheveux argentés, regard bleu perçant… À soixante-dix ans le candidat à l’investiture LR se présente désormais comme le « Joe Biden à la française ».

 « Il a la capacité de rassembler et d’apaiser un pays fracturé. À l’image d’un Joe Biden aux États-Unis, il a l’expérience, la hauteur de vue et la stature internationale que l’on attend d’un président français », a déclaré Daniel Fasquelle, maire (LR) du Touquet-Paris-Plage. 

Le « montagnard » n’est pas encore arrivé en haut du sommet qu’il vise. Persuadé de sa valeur et de sa victoire le 4 décembre, Michel Barnier n’a pas hésité à s’attaquer aux fondements mêmes de l’Union européenne, en appelant sur les questions migratoires à « retrouver une souveraineté juridique pour ne plus être soumis aux arrêts de la Cour de justice de l’UE ou de la Cour européenne des droits de l’Homme ». Ces propos ont suscité l’incompréhension à Bruxelles, où l’ancien commissaire s’est vu accusé de cynisme et de démagogie.

Face à ces critiques il revendique une « ligne gaulliste patriote, européenne et progressiste », et veut croire à l’inverse que son expérience européenne lui donne une légitimité pour blâmer les dysfonctionnements de l’UE, notamment la politique migratoire, et tenter d’y remédier afin d’éviter d’autres Brexit.

Michel Barnier veut créer « un électrochoc d’autorité »

Longtemps regardé avec dédain au sein de sa famille politique, on se moquait de ses centres d’intérêt, l’Europe et l’environnement, des sujets devenus majeurs qui n’avaient pas la cote chez les gaullistes. « Quand ça n’intéressait personne, Barnier écrivait des livres pour sauver la planète et décarboner l’économie », rappelle Serge Grouard.

Au-delà de ces thèmes devenus porteurs, pour contrer la prime à la radicalité, Michel Barnier a dû s’emparer des questions régaliennes. « L’insécurité est le principal échec du quinquennat Macron. On la retrouve partout, y compris dans les communes rurales. Il faut un électrochoc d’autorité pour protéger chaque citoyen, sanctionner rapidement dès le premier délit, appliquer les peines et faire respecter les forces de l’ordre ».
Il souhaite armer les policiers municipaux, recruter des magistrats et créer « 20 000 nouvelles places de prison en cinq ans ». Il veut également « rétablir la double peine » en expulsant les étrangers condamnés à la prison ferme.


Lire aussi : Nicolas Sarkozy, Les Républicains et les affaires…


Fidèle à la famille LR 

Outre l’expérience sur le plan national et international, c’est aussi « la fidélité » à la famille politique qu’il met en valeur. Dans la maison LR, ébranlée, sans leader incontestable et toujours en lutte pour sa survie malgré les victoires aux élections régionales, le « M. Brexit » serait le mieux placé pour l’emporter début décembre. Avec 700 parrainages d’élus, il fait figure de favori alors même qu’il arrive loin derrière Xavier Bertrand et Valérie Pécresse dans les sondages présidentiels.
Pourtant, les militants lui reconnaissent « intégrité » et « cohérence » et exaltent sa loyauté à la famille, alors que ses deux principaux rivaux, qui viennent de reprendre leur carte à LR, ont rompu avec le parti.


Partage